Les Toxi-Infections Alimentaires Collectives

Chaque année, on estime que 600 millions de personnes, soit près de 1/10 dans le monde tombent malades après avoir consommé des aliments contaminés et que 420 000 en meurent. Les enfants moins de 5 ans en supportent 40% de la charge de morbidité et 125 000 en décèdent (WHO, 2022).

Les maladies d’origine alimentaire sont généralement infectieuses ou toxiques provoquées par des bactéries, des virus, des parasites ou des substances chimiques qui pénètrent dans l’organisme par le biais des aliments ou d’eau contaminée. Les contaminations microbiennes peuvent provoquer des problèmes gastro-intestinaux ou des infections graves comme la méningite. Quant à elles, les contaminations chimiques peuvent entraîner des empoisonnements et des maladies graves à long terme comme le cancer. Les maladies d’origine alimentaire peuvent amener jusqu’à la mort.

Toutes les personnes peuvent tomber malades à la suite de l’ingestion d’un aliment contaminé. Cependant, les personnes fragiles (les enfants, les personnes âgées, les femmes enceintes ou les personnes immunodéprimées) sont susceptibles de développer des symptômes sévères.

Toxi-Infections Alimentaires Collectives

Définition des Toxi-Infections Alimentaires Collectives

Au sein des maladies d’origine alimentaire, les maladies qui sont dues à des agents biologiques sont classées sous le nom de Toxi-Infections Alimentaires qui deviennent Collectives (TIAC) et soumises à une déclaration obligatoire lorsqu’au moins deux personnes sont atteintes d’une symptomatologie similaire à partir d’une même source alimentaire (Santé Publique France, 2023).

Elles sont généralement classées en deux catégories, les maladies infectieuses d’origine alimentaire et les intoxinations. Les premières sont dues à l’activité infectieuse d’un microorganisme ingéré vivant (comme le cas d’Escherichia coli EHEC, Listeria monocytogenes, Salmonella, Yersinia, Campylobacter, etc.) et les secondes à l’activité d’une toxine microbienne préformée dans l’aliment (comme le cas de certaines souches de Bacillus cereus, Clostridium botulinum, Staphylococcus aureus, etc.).

Les Chiffres actuels

En 2021, 1 309 toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) ont été déclarées en France, affectant 11 056 personnes, dont 5% se sont présentées à l’hôpital (hospitalisation ou passage aux urgences) et 0,14% (16 personnes) sont décédées.

Parmi les décès, Quatre décès étaient liés à trois TIAC survenues dans le cadre d’un repas familial. Pour une de ces TIAC, l’agent n’a pas pu être confirmé ou suspecté. Pour les deux autres TIAC, L. monocytogenes a été suspecté ou confirmé. Douze décès étaient liés à sept TIAC survenues dans des EPHAD liés aux agents pathogènes suivants : C. perfringens (deux TIAC – confirmé), B. cereus (deux TIAC – confirmé et suspecté), norovirus (une TIAC – suspecté), Campylobacter (deux TIAC – suspecté).

Le nombre de Toxi-Infections Alimentaires Collectives notifiées est en augmentation par rapport à l’année 2020, année fortement impactée par la crise Covid-19, mais reste en dessous des nombres de 2018 et 2019.

En 2021, 394 mesures correctives ont été prises (information/formation du personnel, désinfection d’établissement, demande de travaux, fermeture d’établissement et saisies de denrées) suite à des TIAC survenues en restaurations collectives ou commerciales (Santé Publique France, 2023).

Les chiffres de 2022, récemment publiés par l’EFSA, montrent que 5763 de TIAC ont été déclarées en Europe et en Angleterre affectant 48 605 personnes, dont 6% se sont présentées à l’hôpital et 0,13% sont décédées. Ces chiffres ont augmenté significativement par rapport à 2021 (EFSA, 2023).

Les agents pathogènes incriminés

Depuis 2011, la répartition des agents pathogènes est similaire d’une année à l’autre. Le pathogène le plus fréquemment suspecté ou confirmé en 2021 est B. cereus (26%). Cette proportion est de l’ordre de 25% depuis 2016. Le second pathogène le plus fréquemment suspecté ou confirmé en 2021 était S. aureus. Les Toxi-Infections Alimentaires Collectives liées à ce pathogène représentent historiquement entre 26% et 34% de l’ensemble des TIAC, 25% en 2021. En 2021, le 3ème pathogène le plus fréquemment suspecté ou confirmé était Salmonella. Depuis 2012, entre 12% et 17% de l’ensemble des TIAC déclarées impliquent ce pathogène (16% en 2021). Avant 2011, Salmonella était en en 2ème position. La part annuelle des TIAC virales est très variable depuis 2006 et oscille entre 5% et 19%. En 2021, la part de ces TIAC a atteint 13% de l’ensemble des TIAC déclarées. La part annuelle des TIAC suspectées ou confirmées à C. perfringens oscille entre 5% et 11% depuis 2006. En 2021, cette part est de 5%.

Des données cruciales ont été révélées récemment par l’EFSA pour l’année 2022, pour l’union Européenne. Un nombre élevé en hospitalisations et en décès était causé par L. monocytogenes, nombre le plus élevé par rapport aux années précédentes. Enfin, en 2022, une grave TIAC avec des données solides, provoquée par Streptococcus equi sous- espèce zooepidemicus a été signalée à l’EFSA pour la première fois depuis qu’elle a commencé à collecter des données sur les TIAC. Cette TIAC était causée par la consommation d’un fromage à base du lait cru de vache. Cet évènement constitue une alerte sur le potentiel zoonotique de ce microorganisme qu’il ne faut pas sous-estimer. Cependant, Salmonella, reste l’agent pathogène le plus confirmé parmi les TIAC comme le cas de la France.

Les aliments suspectés

La contamination microbienne des aliments peut survenir à n’importe quel point de la chaîne alimentaire – au niveau de l’exploitation agricole, lors de l’abattage, pendant la transformation ou la préparation. Elle peut également se produire à la maison si les aliments sont manipulés de façon incorrecte ou mal cuits.

Beaucoup de pathogènes alimentaires trouvent leur origine dans les réservoirs animaux qui contaminent ensuite les aliments. L’Homme aussi peut être l’hôte de pathogènes qui contaminent les aliments via les personnes infectées, via le portage cutané ou nasal (cas de S. aureus) et via des contaminations d’origine entérique (cas des E. coli). L’environnement peut également être une source de contamination, ainsi que les ateliers de production (milieu, main d’œuvre, matériel, méthode, matières premières).

Pour la France en 2021, pour 44% des Toxi-Infections Alimentaires Collectives, les aliments suspectés étaient multiples, composés de divers ingrédients ou étaient des plats cuisinés (exemples : salades composées, pizzas, sandwichs, buffet, etc.) ne permettant pas de suspecter une catégorie d’aliments particulière. Des données similaires sont observées en Europe pour l’année 2022. Pour le reste, on en retrouve les coquillages (8% des TIAC), suivie par les œufs et produits à base d’œufs (8%), les poissons (8%), la viande (7%), les volailles (7%), les produits laitiers (5%), les végétaux et produits à base de végétaux (4%), et les produits de charcuterie (3%) (Santé publique France, 2023 et EFSA, 2023).

Les non – conformités en cause dans les Toxi-Infections Alimentaires Collectives

En France, en 2021, pour les trois lieux de repas (milieu familial, restauration commerciale ou restauration collective), 49% des TIAC pour lesquelles des non-conformités ont été relevées étaient liées à des problèmes de fonctionnement, comme des dysfonctionnements dans la chaîne du froid ou bien des erreurs de préparation, 48% reliées à des équipements défectueux ou inadaptés, 40% reliées à un non-respect des règles d’hygiène ou une manipulation inappropriée des aliments par un membre de la famille ou du personnel. 26% sont reliées à une contamination des matières premières, intermédiaires ou produit fini.

CONCLUSION

Le nombre estimé des intoxications alimentaires par an, tant au niveau de la France, de l’Europe ou du monde, témoigne de la difficulté de la maitrise de la sécurité alimentaire, malgré la mise en place des mesures de maitrise importantes par les fabricants. Cela est dû à l’impossibilité d’avoir le risque zéro sur l’ensemble des produits alimentaires fabriqués, aux limites statistiques des plans d’échantillonnage et des analyses microbiologiques et à l’apparition des dangers émergents. Il faut aussi noter que de nombreuses maladies d’origine alimentaire ne sont pas encore connues et identifiées d’où le besoin de développer des techniques rapides et spécifiques de détection et d’identification des pathogènes. Ce qui doit permettre une meilleure efficacité dans la gestion des enquêtes épidémiologiques et une meilleure prévention de ces risques.

De plus, aujourd’hui, la quête du respect de l’environnement et de la recherche des aliments de plus en plus nutritionnels et bénéfiques pour la santé, obligent de revoir les reformulations des aliments et l’optimisation des procédés de production. Un défi qui nécessite de trouver des solutions alternatives innovantes, tout en maintenant la productivité industrielle et la maitrise de la sécurité microbiologique.

Finalement, cela nous montre la nécessité de prendre en compte différents leviers multidisciplinaires pour maitriser les dangers microbiologiques et pour prévenir leur gravité (maitrise des systèmes de management de la sécurité alimentaire, connaissances et maitrise des procédés de fabrication, des caractéristiques des produits alimentaires, des microorganismes, des méthodes d’analyses ainsi que de la règlementation et beaucoup d’autres technologies et thématiques).

Auteur : Reine MALEK

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